En parlant des OGM dimanche dernier, je suis retombée sur les discours de Vandana Shiva, une figure de la lutte pour une agriculture paysanne. J’ai eu envie de dresser son portrait et de parler de ses luttes en général. Je connaissais bien le personnage, mais assez mal son parcours, j’avoue y avoir passé un peu de temps cette semaine et ça n’a pas été ma newsletter la plus simple… Pour le coup, elle m’a demandé plus de recherche que de vérification. Zoom sur cette femme, assez incroyable.
Vandana Shiva, c’est qui ?
Née en 1952, elle a passé sa vie à lutter pour la justice sociale (terme assez global sur ces différents combats). Avant de consacrer sa vie à militer, elle s’est forgée d’un fort bagage éducatif : licence en physique quantique, master et un doctorat en philosophie des sciences. Les luttes sociales, c’étaient dans ces veines : son grand-père est décédé suite à une grève de la faim pour lutter POUR l’ouverture d’une école pour filles, ses parents étaient déjà engagés dans la protection de la nature.
C’est une des figures de la lutte anti OGM, mais pas seulement, elle a mené de nombreux combats
Parmi lesquelles :
la déforestation : dès 22 ans, elle rejoint le mouvement Chipko, un mouvement pacifiste où les villageois se collaient aux arbres pour éviter la déforestation. Mouvement pour lequel elle a été très active et quelques années plus tard, elle réitère avec les montagnes pour éviter la construction de mines.
Pour que les paysans sortent de la pauvreté, notamment en passant par l’émancipation de la femme - elle mène un combat contre la révolution verte d’Inde.
Contre les OGM, la non-brevetabilité du vivant et préservation du patrimoine naturel
Les multinationales, elle fait fermer une usine de Coca-Cola qui puisent les ressources des nappes phréatiques et empêchent les paysans de cultiver leurs terres.
La biodiversité.
Je dis “elle” bien-entendu, elle n’est jamais seule dans ces combats, souvent entourée et soutenue par de femmes. D’où son positionnement éco-féministes.
Elle est conférencière et écrivaine avec pas loin de 17 livres à son actif, parmi les plus connus : “1 % : Reprendre le pouvoir face à la toute-puissance des riches”, “Éco-féminisme” ou encore “qui nourrit réellement l’humanité”.
Ses “prix” / “reconnaissance” :
En 1993, elle obtient le prix Nobel alternatif pour l’environnement.
Times la baptise “héroïne environnementale”.
Forbes la classe parmi les 7 féministes les plus puissantes au monde.
Bien sûr, se battre contre les industriels, n’est pas sans y laisser des plumes, elle a beaucoup été décriée notamment pour ne pas avoir un vrai passeport scientifique ou émettre sans preuve que le glyphosate engendrerait des risques pour la santé.
La révolution verte :
En 1960, l’Inde met en place un ensemble de politique pour développer son agriculture :
sélection et distribution de graines à haut rendement,
mise en place de système d’irrigation,
et pour agrémenter le tout : un peu de chimie (pesticides).
Ces mesures ont permis de quadrupler la production de l’Inde (quand la population a triplé).
Seulement ces graines ne sont pas adaptées à l’écosystème indien (une partie de ces graines sont sélectionnées au Mexique). Elles sont gourmandes en eau et épuisent les nappes phréatiques. Dès les années 90, la production stagne : l’industrialisation de l’agriculture a appauvri les sols.
En effet, les semences utilisées auparavant étaient des semences sélectionnées depuis des années par la population autochtone, car adaptées au sol et au climat. Les rendements sont moins importants, mais les cultures s'inscrivent dans la durabilité du modèle alimentaire de l’écosystème.
Malheureusement, l’agriculture a été adaptée à ces nouvelles semences (utilisations de machine, de système d’irrigations et achats d’intrant vs agriculture paysan sans intrants), il faut donc maintenir un niveau de productivité pour ne pas augmenter la pauvreté.
Le sujet d’une seconde révolution verte est sur la table, celle des OGM. Modifier le génome des plantes pour s’assurer des rendements.
Sa lutte anti-OGM ?
À l’aube seconde révolution verte, Vandana Shiva se dresse contre. La première révolution verte a permis au riche de devenir très riche et au pauvre un peu moins pauvre, mais a créé une dépendance des pauvres pour s’approvisionner en semences. Les agriculteurs sont obligés de contracter des microcrédits pour acheter des semences pour lesquelles on fait miroiter un rendement qui n’aura pas lieu. Le taux de suicide des agriculteurs a largement augmenté à cette période-là. (Bon… je n’ai pas les chiffres et les “pro-Vandana Shiva” s’appuient sur le fait que les suicides ont augmenté et les “anti-Vandana Shiva” disent que c’est faux. Je le pose ici par souci de transparence sur mes recherches).
Grâce à son combat, le blé et le riz basmati ne peuvent pas être génétiquement modifiés.
Elle a créé Navdanya, une ONG pour préserver les semences et une banque de semence. Toutes les semences y sont conservées et préservées, les paysans peuvent venir utiliser les semences et à la récolte, rapportent dès nouvelles semences de ce qu’ils ont produit.. C’est un vrai enjeu, la gestion et la conservation des semences paysans, en Inde et partout dans le monde, notamment, face au changement climatique. C’est un sujet passionnant qui fera l’objet d’une prochaine newsletter.
Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ?
Est-ce que l’on doit parler de cette lutte ? Parmi les choses qui n’ont pas pour moi, il y a cela. Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes est un droit international pour que chaque peuple puisse choisir librement sa politique sans influences tiers.
C’est un des combats de Vandana Shiva pour que le peuple indien puisse en toute indépendance (sans influence capitaliste/multinationales ou de politique étrangère) décider de la façon dont ils exploitent leur terre.
En vrai, je n’ai rien à dire sur ce sujet, juste rappeler qu’on a ce besoin incessant d’expliquer aux autres à quel point on a mieux compris qu’eux comment exploiter leur écosystème.
😑
Je conclurai avec ce paradoxe sur l’Inde : c’est le plus grand exportateur de riz (aliment de base) et en même temps le pays où le plus d’humain souffre de la faim.
Pour aller plus loin :
Je te conseille le TEDx de Vandana Shiva, c’est à peu près mes combats au quotidien, résumé en 10 min et dis avec le sourire.
Un résumé vidéo de brut.
Sur cette série sur les dissidents du climat de l’émission Culture monde de France Culture un épisode sur la contre-révolution verte en Inde.
Avant de finir :
👋 Coté Fourmi, les stocks ont baissé à une vitesse folle cette semaine, il reste encore pas mal de choses, je vous fais un petit topo demain :)
Merci pour vos nombreux retours de la semaine dernière, je me rends compte que la newsletter a pas mal tournée et que j’ai oublié de mettre le petit bouton pour s’abonner, il est lààààà :
Tu me lis pour la première fois ? Tu peux retrouver toutes mes archives ici.
Et voilà, c’est tout pour aujourd’hui !
Bon dimanche
-Axelle ⚡️